Freddy Debarsy (DéFi) se lance en politique à 67 ans


Dans On débat
Antoine Ramet

Photo Debarsy

Y a-t-il un âge pour commencer la politique? Pas pour Freddy Debarsy. À 67 ans, cet ancien commissaire de police de Liège sera la tête de liste fédérale pour DéFi à Liège. Focus sur cette nouvelle tête politique wallonne obsédée par la nuance. 

Si, aujourd’hui, le retraité consacre la majorité de son temps à la politique, le jeune Freddy Debarsy jouissait d'autres loisirs. Passionné de cyclisme, il avoue avoir délaissé l'école pour cette vocation qu’il pratiquait en tant que semi-professionnel. Un drame personnel rangera le vélo au placard: il perd son père à l'âge de quinze ans. Un événement qui l’a poussé à se lancer dans la vie active. Il commence jeune, en tant que tailleur sur cristaux au Val Saint-Lambert. Il effectue ensuite son service militaire obligatoire à 19 ans. Cette expérience l’a encouragé à se lancer dans le métier de policier. Profession qu’il pratiquera à différents échelons durant 43 années, pour atteindre le rang de commissaire. Parallèlement, il entraîne les jeunes de moins de 16 ans du Standard de Liège ainsi que l’équipe féminine des Rouches, laquelle a remporté un titre de champion. 

Un engagement tardif 

Il y a une raison pour laquelle Freddy Debarsy débarque sur le tard en politique: la déontologie policière. Sa réticence ne l'a pas empêché de s'engager autrement. Pendant deux ans, il préside le SLFP (Syndicat Libre de la Fonction Publique). Son passé de fonctionnaire lui vaut un fort attachement aux services publics: «Les budgets du régalien ne devraient jamais bouger. Ils devraient même être indexés. Quand je vois tous les infirmiers qu’on applaudit mais qu’on n’aide pas! Je n’ai pas attendu d’attraper le COVID pour considérer ces gens-là comme importants.» 

Pourquoi DéFi?

Avant de rejoindre le parti amarante, Freddy Debarsy a tenté de fonder «Le Parti Universel». Une structure «qui s’occuperait de tout le monde». Aux yeux de l’ancien président du SLFP, le paysage politique paraît trop clivé : «La droite prend des décisions pour les plus nantis, la gauche pour les ouvriers». Preuve de sa motivation : il rédige un programme d’une soixantaine de pages… qui restera dans son ordinateur. «En discutant avec mon épouse, je me suis rendu compte que la tâche s'avérait insurmontable. J’ai donc décidé de rejoindre un parti qui correspond à mes valeurs.» Déboule DéFi.

Mais pourquoi le parti de François De Smet et pas un autre? Pour Freddy Debarsy, la réponse semble évidente: «Gouvernance solide, participation citoyenne, laïcité et bon sens. Selon moi, si une bonne décision de gauche est à prendre, on la prend. Mais si une mesure de droite semble plus indiquée, il vaut mieux opter pour l'autre bord». Il souligne également «l’aspect démocratique» du parti. Bien que, selon lui, cette vertu ait ses limites. L'escarmouche entre le président François De Smet et son prédécesseur, Olivier Maingain, aurait été déclenchée par un conflit autour de cette valeur.

Une histoire de mesure 

Dans un parti dont il apprécie la mesure, l’ex-président du SLFP peut porter une voix qui détonne. Il assume ce franc-parler qu’apprécie François De Smet: «Je suis un citoyen moyen, et si je rentre en politique, j'y arrive avec cette mentalité-là. Ne me demandez pas de me brider quand j’ai quelque chose à dire». Une franchise qui a pu lui jouer de mauvais tours. Il se rappelle d’une anecdote lors d’un débat à propos des sans-papiers: «J’ai été hué, je n’ai pas honte de le dire». Lors de l'événement, à la question «pourquoi la société est-elle hostile aux sans-papiers?», la tête de liste liégeoise rétorque en puisant dans son expérience personnelle : «Si un policier se comporte mal, c’est toute la police qui en pâtit. C’est pareil pour les sans-papiers. En tant que policier, j’ai vu des meurtres, j’ai vu des viols. J’ai voulu dire que ce qui dessert la cause des sans-papiers, ce sont ceux qui se comportent mal». Nadia Moscufo (PTB), qui participait au débat ce jour-là, l’a accusé de «faire des liens entre délinquance et immigration». Il a tout de même pu compter sur le soutien de son président: «En échangeant avec François De Smet, il m’a assuré que je n’avais rien dit de mal.»

Ô capitaine, mon capitaine 

La tête de liste liégeoise a choisi son camp dans la bataille entre François De Smet et Olivier Maingain. Il ne tarit pas d’éloges à l’égard de son président : «François de Smet est un gars remarquable. Très gentil». Peut-être un peu trop, selon le cycliste sprimontois: «Je trouve même qu’il n’est pas assez dur. En débat, ses mots sont toujours pesés, il ne crie jamais. Je lui ai dit “si tu te montrais plus mordant, peut-être que tu attirerais davantage de monde"'».

Freddy Debarsy entretient une bonne relation avec son président. C’est ce dernier qui l’a convaincu de s'afficher en tête de liste : «Il me l'a proposé, je n’ai jamais rien demandé. Il faut savoir que je ne voulais même pas figurer sur les listes.» Le choix de François De Smet viendrait d'une appréciation mutuelle : «Il m’a dit: “Freddy, tu as un certain charisme, mais ce que j’apprécie beaucoup chez toi, c'est que tu parles vrai”». Cette nomination n’a pourtant pas plu à tout le monde. La conseillère communale d’Engis Julie Leclercq, qui convoitait la tête de liste liégeoise, a demandé en novembre la démission de François De Smet pour «discrimination, non-respect des électeurs et des élus». Sans succès, puisque c’est toujours le Sprimontois qui occupe le haut de la liste amarante. 

Freddy Debarsy s'en montre conscient : sa carrière en politique ne battera pas des records de longévité : «Vu mon âge, je ne vais pas lutter pendant 10 ans. La politique bouffe de l'énergie, c'est un métier complexe». Du propre aveu de Freddy Debarsy, DéFi a du mal à s’imposer en Wallonie. Le pari du François De Smet de mettre un nouveau visage en tête de liste sera-t-il payant? En tout cas, il semble accorder toute sa confiance à l’ancien commissaire de police.

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