« Marche Salope », ode à la reconstruction


Dans Culture En ville
Marina Quertinmont

Photo : Nathan Cloes

Marche Salope se résume comme un voyage introspectif dans l'esprit d'une victime de viol. Du traumatisme à la libération, Céline Chariot interprète un personnage muet en pleine reconstruction.  

Marche Salope durant le spectacle recadré

Céline Chariot lors de la scène d'ouverture de « Marche Salope ».

« C'est alors que je l'ai reconnu, surgissant du passé, il m'est revenu » 

Le traumatisme du viol ressurgit et assaille sa victime comme un oiseau de proie. « Marche Salope » démarre sur l'air de l'Aigle Noir de Barbara. Rappelez-vous : cette chanson sort en 1970. Anodine, elle révèle après le décès de sa chanteuse une réalité sombre : l’inceste.  

Une unique personne se dresse sur scène, muette : la victime. La dame vêtue de noir s'assied calmement sur une chaise face au public. Elle regarde le spectateur droit dans les yeux pendant de longues minutes. Le silence s'installe. Le spectateur se tait. Silence et lourdeur s'emparent de la salle.  

Pas une comédie

Le spectacle relate des faits réels survenus au Canada, en 2011. Céline Chariot, créatrice et interprète de la pièce, explique : « Des filles déposent une plainte auprès d'un policier après une agression. Il leur répond qu'en gros, c'est de leur faute. Elles n'avaient pas besoin de s'habiller comme une salope ». De là naissent les SlutWalk, ou « Marche des salopes ». Ces manifestations prennent de l'ampleur. Leur but : faire du bruit par le silence. La pièce de théâtre l’exploite avec poésie. Le mutisme de la protagoniste dénonce avec férocité.

Céline Chariot, cigarette à la main, nuance pourtant : « je ne souhaite pas faire justice ». La photographe de formation s'interroge simplement sur cette réalité. La société tait les faits et bâillonne les victimes. Elle souhaite offrir une vision poétique et accessible sur cette problématique. La lecture de son œuvre se veut « vivante ». Le spectateur interprète. Il construit la scène de 55 minutes en même temps que la victime. Il suit le même cheminement psychique que la dame en noir. Son seul guide : une voix-off.  Conscience de la victime ou narrateur omniscient ? Le public reste seul juge. 


 « Est-ce que tu sais seulement jusqu'à quel point tu ne sais pas ce que tu sais ? » 

 

Un spectacle à découvrir dans le cadre du festival de Liège des arts de la scène, jusqu’au 18 février 2023.

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