Covid-19 : la situation des Grignoux


Dans Culture
Simon Evrard

Photos : © Grignoux, Alain Janssens et Thierry Lechanteur

Suite aux décisions prises par le gouvernement le 12 mars pour contrer la pandémie de coronavirus, le secteur culturel est à l’arrêt. Comme d'autres institutions, l’ASBL liégeoise des Grignoux a dû cesser toutes ses activités. Qu’en est-il de leurs travailleurs et travailleuses, directement impacté(e)s par ces décisions ? Entretien avec Stéphanie Sciacca, salariée aux Grignoux.

Stéphanie Sciacca est passionnée par l’art depuis de nombreuses années. Après avoir réalisé ses secondaires à l’Ecole Supérieure des Arts Saint-Luc de Liège, elle entreprend des études supérieures à l’Académie Royale des Beaux-Arts. Depuis 2008, elle travaille dans une institution toujours active dans ce domaine : les Grignoux. À côté de cela, elle a repris des études de gravure à l’Académie des Beaux-Arts.

L’ASBL des Grignoux est une entreprise culturelle d’économie sociale active dans le domaine du cinéma. Elle est répartie sur trois sites liégeois (Le Parc, Churchill, Sauvenière) et un site namurois (Caméo). En offrant une alternative à la culture dominante et en permettant un accès au septième art à un public le plus large possible, elle accueille à peu près 2 000 personnes par jour et occupe plus de 150 travailleurs.

cinma-sauvenire 10227997413 o (1) 

Studiobus : Les Grignoux ont immédiatement communiqué leur fermeture jusqu’au 3 avril. Quelle a été la réaction des membres du personnel ?

Stéphanie Sciacca : D’une part, c’est assez étrange pour nous parce que le cinéma ne ferme jamais, habituellement. Il est toujours ouvert, que ce soit durant les jours fériés ou pendant les fêtes. Le seul jour de fermeture est celui, une fois par an, de la fête des travailleurs. On s’attendait à ce confinement, mais on ne se rendait pas bien compte de la façon dont ça allait être géré. L’information est finalement tombée. D’autre part, il y a eu tout un questionnement : Comment le cinéma va-t-il survivre ? Comment les travailleurs vont-ils être payés ?… Beaucoup de questions sont venues d’un coup. Certains allaient se retrouver isolés, alors que pour eux le boulot est une échappatoire. Chacun réagit à sa façon.

Dans une telle institution, le travail à domicile devient impensable. Sous quel régime avez-vous été placé(e)s ?

En effet, pour les travailleurs et travailleuses sur le terrain, on peut dire qu’on ne travaille plus du tout. Mais celles et ceux au bureau (notamment les RH) restent joignables pour aider leurs collègues. D’autres réfléchissent à comment réorganiser les événements, relancer l’activité et rebondir après la crise. Les travailleurs et travailleuses dans mon cas ont été mis(es) au chômage temporaire pour force majeure : 70% du salaire brut et 5€ par jour de l’ONEM. Les Grignoux nous ont laissé le choix : nous pouvions prendre nos vacances maintenant si l’on en avait envie, pour perdre moins de nos salaires. Mais ça n’arrange pas tout le monde… Ce ne sont pas comme des vacances où l’on peut se dire que l’on va aller au cinéma ou se promener.

10132734193 96bc9b959f o (1) 

Le 27 mars, le confinement a été prolongé jusqu’au 19 avril. À l'époque, on annonce que cette décision pourra être renouvellée jusqu’au 3 mai. Vous apprenez donc que les Grignoux ne peuvent pas reprendre leurs activités comme prévu…

Je m’y attendais et m’y préparais. Le cinéma n’étant pas une première nécessité, il me semblait évident qu'ils ne rouvriraient pas tout de suite… Je me pose plutôt la question de savoir comment relancer tout ça. Les responsables sont en tout cas en train de réfléchir, même si les cinémas restent fermés, à la manière d’avoir du public et de le ramener à nous d’une façon ou d’une autre.

Au final, quel est l’impact du coronavirus sur le lien social entretenu entre les membres du personnel ?

On a vraiment une équipe formidable. Je ne vais jamais travailler avec des pieds de plomb. Même si, pour le moment, cela ne me pèse pas trop, je me rends compte que mes collègues me manquent et que le contact avec le public aussi. Grâce aux réseaux sociaux, on reste quand même fort en contact. Même si ce n’est pas pareil, le lien entre nous est, en quelque sorte, maintenu. Mais, au sein des Grignoux, on est tous différents et on ne réagit pas tous de la même manière… Le manque de contact peut être très difficile à vivre pour certains, et le temps joue aussi là-dedans. Et puis, tous les bons moments que je passe avec mes collègues ne sont pas pareils via les réseaux sociaux…

Partager cet article