Manon Lepomme, de l'école à la scène


Dans Culture
Julien Haid

Photo : Henri Magères

À 31 ans et grâce à une autodérision redoutable, Manon Lepomme, a réussi, en quelques années, à se faire une place de choix dans le monde de l’humour belge.

Jeune liégeoise, un brin déjantée, Manon Lepomme a d’abord travaillé au sein d’une ASBL pour le transport des personnes à mobilité réduite. Elle a aussi suivi des études de sciences politiques, orientation relations internationales (diplômée depuis 2011). Ensuite, elle a été professeure de langues en région liégeoise pendant trois ans. En parallèle, la jeune liégeoise est montée sur les planches pour travailler sa répartie dévastatrice et sa spontanéité enfantine. Aujourd’hui, Manon Lepomme est comédienne à part entière.

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Studiobus : Qu’est-ce que vos études universitaires vous ont apporté dans votre carrière artistique ?

Manon Lepomme : Cela a forcément renforcé mon côté terre à terre et ça m’a probablement aidé à faire avancer ma carrière. Mes études universitaires m’ont aussi permis de prendre conscience du monde dans lequel on évolue. De plus, l’université m’a apporté un réseau professionnel qui m’a permis de me faire connaître un peu partout. Parce que tout est une question de réseau, et pas forcément de talent. Triste constat ! 

Vous vous êtes donc construit un réseau qui vous a permis de vous diriger vers le métier de vos rêves, celui de comédienne ?

En effet, c’est le métier dont je rêve depuis toute petite. J’aimais déjà faire rire mes camarades de classe à l’âge de 6/7 ans. Même si j’ai toujours rêvé de pratiquer cette profession, on n’est pas conscient de tout ce qu’il faut faire comme sacrifices : horaire décalé, week-end consacré au boulot, beaucoup de voyage, peu d’heures de sommeil, beaucoup de pression… C’est un métier de passion.

C’est cette passion qui a été le déclic pour lâcher votre métier d’enseignante ?

L’enseignement était mon salaire et la scène était mon plaisir. Quand j’ai commencé à jouer de plus en plus, j’ai compris qu’il fallait mettre de côté l’enseignement pour me consacrer pleinement à mon métier de comédienne. D’ailleurs, je n’ai jamais vraiment eu l’intention d’y faire carrière, même si j’adorais les élèves. Être en contact avec des jeunes a vraiment été très enrichissant, c’est tout le système qui me lourdait un peu. Mais maintenant, je gagne de l’argent en me faisant plaisir. Donc, c’est encore mieux.

Votre ancien métier vous a-t-il inspiré pour créer votre 2e spectacle “Non, je n’irai pas chez le psy“ ?

Ces trois années d’enseignement m’ont vraiment permis d’être à l’écoute, à l’affût de tout ce qu’il se passe autour de moi. Néanmoins, il y a juste un sketch de 10 minutes (sur 1h40 de spectacle) qui en parle. L’enseignement était une étape dans ma carrière. Dans mon spectacle, j’évoque plein d’autres choses comme ma gourmandise maladive, mon coup de foudre dans un bus ou encore l’Alzheimer de mes grands-parents. Les spectateurs se seraient ennuyés si j’avais uniquement parlé d’enseignement.

« L’enseignement était mon salaire et la scène était mon plaisir »

L’humour vous a-t-il apporté un autre regard sur le monde que l’enseignement ? Constitue-t-il une thérapie pour vous ?

C’est souvent ce qu’on dit pour faire plaisir aux journalistes (rires). En réalité, ce n’est pas vraiment le cas. J’adore jouer, j’adore raconter des histoires… Voilà, rien de bien thérapeutique là-dedans. Juste beaucoup de plaisir. Néanmoins, mes études et mon ancien métier m’ont ouvert l’esprit et m’ont finalement pas mal servi, notamment au niveau de la culture générale. Cependant, l’humour à un côté très irrévérencieux, je me permets de rire de tout et surtout de moi-même. J’ai tendance à y aller à fond avec un côté un peu rentre-dedans. L’humour m’a ainsi apporté un autre regard sur le monde, c’est indéniable !

Et si tout s’arrêtait, que feriez-vous ? Vous reviendriez à votre première profession, prof d’anglais ?

Non, je ne pense pas. Avec mon métier actuel, j’ai développé un gros réseau et j’aurais d’autres opportunités pour évoluer professionnellement. Je pense notamment au théâtre-action[1], que j’adorerais pratiquer. Puis, c’est difficile de reprendre l’enseignement quand on a arrêté longtemps. En plus, je ne pratique plus beaucoup l’anglais et le néerlandais depuis 5 ans, ce serait malhonnête que de penser que je pourrais encore les enseigner.

 

[1] Le théâtre-action est un mouvement théâtral différent qui vise à susciter la réflexion ou le changement. C’est un théâtre qui ne veut pas rester neutre qui est à la croisée de l’art et du théâtre. Source : www.ophelia-theatre.fr

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