Olivier Pirnay: « Mon dessin préféré, c’est celui de demain »


Dans Culture
Manon Allard

Illustrations : Olivier Pirnay (www.humeurs.be)

En s’imposant le rythme d’un dessin par jour, l’humour d’Oli et la pertinence de ses caricatures ont rapidement été repérés par plusieurs journaux. Aujourd’hui, il réalise environ 12 dessins par semaine pour la presse, le tout cumulé à des projets privés.

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Olivier Pirnay, dit Oli, est dessinateur de presse pour les journaux du groupe SudPresse depuis 2015. Après des études en illustration/BD et une formation en web development, Oli débute sa carrière en tant que graphiste. Ressentant le besoin de s’exprimer au travers du dessin, il ouvre son blog, les Humeurs d’Oli en 2009. Ce sera le plus gros virage de sa carrière car c’est là qu’il va vraiment voir une évolution dans son travail et sera contacté par différentes entreprises.

Studiobus : Pouvez-vous citer un événement marquant dans votre carrière ?

Olivier Pirnay : Le 7 janvier 2015 marque un tournant dans ma vie personnelle et professionnelle. Ma femme était sur le point d’accoucher quand j’ai appris les terribles événements chez Charlie Hebdo. J’ai ressenti un immense besoin de m’exprimer et j’ai griffonné un dessin sur le coin de ma table de salon. Je l’ai envoyé à ma rédaction avant d’emmener ma femme à l’hôpital. C’est seulement en rentrant que j’ai vu que mon dessin avait été partagé massivement et l’impact que cela avait eu.

Dessin attentats

Vous faites preuve d’un grand esprit critique, est-ce parfois mal vu ?

Pour comprendre mes dessins, il faut un contexte et des codes spécifiques. A la suite des attentats, il est vrai que la rédaction a fait plus attention à la vérification des dessins après avoir reçu plusieurs messages haineux et des menaces. Mais pour moi, ce qui est drôle, c’est justement rire de choses dont on ne peut normalement pas.

Les personnes que vous caricaturez apprécient-elles votre travail ?

Les hommes politiques surtout aiment être caricaturés car cela leur donne de l’importance. Il faut bien comprendre que mes dessins sont bienveillants et je fais en sorte de pouvoir les expliquer à la personne si nécessaire. Il est important pour moi de ne pas se moquer gratuitement du physique. Je ne critique pas la personne, mais ses actions. Il ne faut pas confondre les défauts avec les caractéristiques, sans cela nous serions des êtres plats et sans expression.

Premier dessin

Vous parlez de la politique, avez-vous des sujets de prédilection ?

Je n’ai pas de sujet préféré, c’est justement ce que j’aime dans mon travail : la variété. Mon challenge est de faire rire avec des sujets aussi barbants que les radars-tronçons… Quand on me demande mon dessin préféré, je réponds que c’est celui de demain, car il sera meilleur que les précédents, enfin je l’espère… J’attache beaucoup d’importance à l’amélioration et c’est en pratiquant qu’on arrive à des résultats. 

Quelles sont vos techniques pour rendre l’actualité plus légère ?

J’aime croiser les univers, en mélangeant des actualités avec des références culturelles ou artistiques. Je pense notamment au dessin réalisé sur base de la bataille d’Astérix, qui reprend différents acteurs politiques. Ce dessin m’a demandé énormément de réflexion pour être le plus juste possible et savoir exactement qui tapait sur qui, etc. Ce qui demande le plus de temps, c’est de trouver la bonne idée, le message à transmettre, mais les gens ne le remarquent pas toujours. 

Dessin Astérix

Le dessin de presse vous offre une certaine liberté, qu’en est-il des demandes privées ?

Je dois bien avouer que les demandes privées ne sont pas ce que je préfère. Les gens sont souvent difficiles et ont une idée bien précise en tête. C’est pourquoi j’attends souvent le dernier moment pour m’y mettre et ainsi éviter d’avoir trop de remarques. Cela change du dessin de presse où je n’ai pas besoin de l’approbation des personnes illustrées. Le dessin n’est pas fait pour plaire à la personne, c’est justement pour ça qu’il est décalé. 

Quelles sont vos relations avec la rédaction, avez-vous des anecdotes ?

En réalité, je ne suis allé qu’une seule fois dans les bureaux de la rédaction, lors de mon entretien d’embauche. Je n’ai jamais rencontré les personnes avec qui je parle au téléphone tout les jours. En général on arrive à se mettre d’accord sur la manière d’aborder les sujets et mes dessins sont de moins en moins refusés car on a réussi à se comprendre. Petite astuce, entre nous, si il m’arrive par miracle de trouver une idée rapidement, je me garde bien de l’envoyer trop vite à la rédaction pour ne pas les habituer à avoir tout immédiatement et garder une marge dans mes délais…

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