Covid-19 : pas de panique à bord


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Lola Nunes

Vanessa André est graphiste. Poussée par l’envie de voyager, elle a tout quitté pour devenir membre d’un équipage à bord d’un bateau de croisière. Depuis le mois de décembre, elle continue d’exercer son métier et s’attèle à remplir diverses tâches, comme la réalisation de la carte des menus ou encore le journal quotidien. Le 22 mars dernier, son contrat s’est achèvé. Elle se retrouve bloquer sur le bateau, au large des îles Canaries, sans possibilité de rentrer en France.

Lola Nunes : Comment percevez-vous la frénésie actuelle autour du Covid-19 ?

Vanessa André : Sur le bateau, nous vivons dans une bulle. Alors qu’en France les magasins ont des ruptures de stocks, que tout est fermé, nous avons encore de tout, ici. Nous suivons les infos, et je comprends la panique devant le sentiment d’impuissance. Je suis tout a fait consciente que je vis cette situation de manière particulière. Certaines personnes de l’équipage l’éprouvent plus difficilement, et on été mis sur la liste des prioritaires, pour qu'elles rentrent chez elles promptement.

Nous nous doutions que nous allions être impactés. Nous avons tout de suite été rassuré sur le déroulement des semaines à venir : l’équipage allait être payé, nourri et logé jusqu'à la fin des contrats, même s'il n'y avait plus de passager. Ceux qui voulaient partir avant ce terme le pouvaient,  Il fallait simplement le faire savoir, et un vol était organisé aux frais de la compagnie. Depuis le 14 mars, nous n’avons pas le droit de descendre du bateau, nous sommes sans passager depuis le 16, et en quarantaine depuis le 22. À l'heure où je vous parle, nous en sommes à 26 jours sans passagers, et sans cas de Covid-19 confirmé, ni soupçonné.

Êtes-vous équipés pour lutter contre le virus ? 

Le bateau a été nettoyé et désinfecté par l’équipage. Puis nous avons fermé les espaces passagers et reçu une dizaine de thermomètre pour pouvoir prendre notre température tous les matins. Si quelqu’un fait de la fièvree, il est immédiatement isolé dans une cabine. Et, évidemment, nous nous désinfectons les mains encore plus qu’avant. Il y a deux médecins, deux infirmiers et une stagiaire à bord. Les personnes isolées pour causes de toux ou de fièvres reçoivent leur visite médicale dans leur cabine. 

Nous ne sommes pas testés mais, si nous avions des symptômes clairs ou des difficultés respiratoires, nous sommes transférés dans un hôpital espagnol. Nous ne pouvons pas sortir du bateau sans raison valable. Toutefois, certains ont le droit de sortir si c’est pour se rendre a l’aéroport, afin quitter le pays. Notre médecin de bord a l'autorisation de se rendre a la pharmacie, avec une escorte policière. 

1200px-Bateau de croisière au Port de Tanger Ville 

Comment est la vie sur le paquebot depuis le confinement ?

Ce n’est pas le plus grand ni le plus luxueux des bateaux de croisière, mais il y a un spa, une piscine, une salle de sport, un grand théâtre, plusieurs restaurants et bars, un parfumerie, des magasins… Nous avons accès à presque tous les espaces clients. Nous n'avons pas besoin de faire les courses, nous ne manquons de rien, pas même de papier toilette… La compagnie nous a offert à tous un forfait wifi illimité sur les réseaux sociaux, pour que tout le monde puisse communiquer avec ses proches. Mon quotidien et mes activités n’ont pas énormément changé. Je lis beaucoup, je vais a la salle de sport, je fais énormément de recherches sur internet pour trouver les meilleures histoires à mentionner dans notre journal.

Vous continuez à travailler ?

Toujours, mais moins qu’avant, forcément. En temps normal, mon job consiste a créer le journal quotidien pour les clients, avec les programmes journaliers. À présent, il est imprimé pour les membres d’équipage, avec les horaires de notre cantine et de notre bar, mais aussi avec des histoires de marins ou encore des mots croisés traduits dans toutes les langues parlées a bord. Il s'agit de notre manière a nous de ne pas perdre la main, et de garder la bonne humeur sur le bateau.

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