L’expo «Emil.ia» alerte sur la détransition de genre


Dans Culture
Ornella Foalem

L’exposition «Emil.ia» présente le processus créatif de la bande dessinée éponyme de Peer Jongeling. L’occasion de découvrir ce qui a inspiré la dessinatrice: les réalités méconnues de la détransition de genre, soit le retour au genre d’origine après une transition.

                                                           0e07c7af-a0d1-4395-9f77-5bdce30d7ce6             La dessinatrice Peer Jongeling axe son travail sur la dysphorie de genre  © Chelsea Kinzunga                   

Une feuille blanche et un crayon. Avec ces simples outils, les dessinateurs de bande dessinée ouvrent une fenêtre sur un monde en constante évolution. Parmi ses témoins-clé, Peer Jongeling. Le travail de l'autrice allemande trône au centre d’une exposition au bâtiment B3. Les planches exposées sont extraites du deuxième livre de la dessinatrice, intitulé «Emil.ia». 

Les couleurs vives qui composent les dessins de Jongeling contrastent avec le blanc immaculé des murs et du sol. En s’approchant d’un peu plus près, on constate alors la présence de personnages dont l'apparence peut dérouter: si ces protagonistes possèdent un corps humain tout à fait normal, leurs visages évoquent des têtes d"animaux. Peer Jongeling justifie ce choix par la proximité qui unit être humains et bêtes : «Elles brillent d'intelligence. Malgré leur caractère têtu, elles bénéficient d'une incroyable capacité d’adaptation». Au centre de la pièce siège une seule et unique installation artistique. Elle représente des seins qui s’entremêlent. 

3d77eab2-f037-4eae-9204-e5b63038bd6f

La poitrine tient une place particulière au sein de cette exposition © Chelsea Kinzunga 

Ces organes rayonnent d’ailleurs sur toute l’exposition. Petits, gros, encombrants… À travers son héroïne Emilia, Jongeling  livre le rapport complexe qu’elle entretient avec ses attributs féminins. Elle évoque un souvenir d’enfance qui a inspiré une des planches présentées : «À l’époque, je me disputais souvent avec ma mère, qui ne me permettait plus de jouer torse nu dehors. J’étais trop jeune pour comprendre qu’elle voulait me protéger et que mon corps était désormais considéré par la société comme sexuellement attirant.» 

a70f7ee1-2f4d-4f82-86f8-d651bb439c10

Les planches présentées sont accompagnées des commentaires de la dessinatrice © Chelsea Kinzunga 

L’enfance ne constitue pas la seule source d’inspiration de Peer Jongeling. Le bâtiment où vit son personnage principal imite son ancien logement étudiant. Certaines situations présentes dans la bande dessinée trouvent leurs origines dans ses rêves, ses rencontres, des conversations avec des proches. 

L’exposition ne se contente pas de rapporter le processus créatif de la dessinatrice. Elle détaille également le chemin entrepris par cette femme pour accepter son corps. Si de nombreux documents témoignent du parcours qu’entreprennent les personnes transgenres afin de vivre dans un corps qui leur sied davantage, la détransition demeure un sujet tabou. Les dessins de Peer Jongeling pavent une manière de saisir la pensée d’individus qui ont cru, en changeant de genre, arriver à une acceptation complète de soi.

d14cb2c0-8492-4fac-b8fd-472545d34c30

Il faut parfois entreprendre des choix drastiques pour apprendre à s'aimer © Chelsea Kinzunga

Partager cet article